Nature, place et fonction du savoir dans la cure.
« Ce qui se répète dans les défenses que le sujet met en place, c’est une volonté de perdre la vérité de l’événement initial. C’est la vérité de ce savoir inconscient, restitué au cours d’une première tranche d’analyse, qui me permit de faire face aux fonctions de thérapeute qui me furent confiées prématurément à l’hôpital1.»
Si j’ai choisi de placer en exergue ce propos de Maud Mannoni, c’est parce qu’il unit les nœuds posés par la question du savoir dans le cadre de la pratique analytique. S’y mêlent le sujet analysant et le « psy », la vérité et le savoir, la question de l’inconscient, la formation de l’analyste (ou les formations de l’inconscient ?), la répétition ; c’est également parce qu’on y voit poindre la notion de responsabilité du sujet, et la manière dont du psychanalyste est advenu face à un effet de vérité dans la cure que j’ai opté pour ce point de départ. En effet, cette question du « qui sait et que sait-on ?2 » nous occupe par ailleurs tous à un moment ou à un autre : plus d’une fois je me suis demandé ce que je savais vraiment (déjà le vrai et le savoir se trouvent mêlés!), et si cela même que je savais suffisait ou non à faire de moi « une psy ». A ceci qui me répondra ? Et voici qu’apparaissait en plein jour ce tissage complexe entre le savoir issu de l’université et le savoir opaque de l’analyste.
Pour tenter d’approcher cette question du savoir, nous interrogerons son rapport avec la vérité, nous aborderons les discours, lalangue, le désir, le transfert, le fantasme, la répétition, et la jouissance. Nous aborderons brièvement sa relation au pouvoir, manifeste dans le rapport entre les discours de l’analyste et capitaliste. Nous n’échapperons donc pas à l’étalage de connaissances, espérons que d’étalage elles se feront étayage à une réflexion soulevée par Lacan : « il y a là savoir acquis, mais à qui3» ? Pour errer sans manquer de nous repérer, nous suivrons le fléchage proposé en interrogeant la nature, puis la place et enfin la fonction du savoir dans la cure analytique.
I Nature du savoir dans la pratique de la cure analytique
« Le savoir, ça n’a pas de sujet4 »
Il est récurrent dans la cure que l’analysant regrette de ne pas trouver les bons mots. « Les mots me manquent ! » l’entend-on s’agacer, et il ne croit pas si bien dire ! S’il y a une chose que l’enseignement de la psychanalyse nous a transmise c’est qu’ils ne peuvent que manquer, les mots. Ils manquent le sujet lui-même. Et celui-ci de faire l’expérience que quoi qu’il arrive quelque chose se soustraira à sa parole. Comment comprendre que quelque part dans cet interstice se loge le savoir ? Un savoir déjà là et qui a une prise sur son corps ? Car c’est quelque part dans cette « motérialité » du signifiant qui diffère de toute prise du sujet que se produit parfois « un effet de vérité » dans ce savoir que l’on croit avoir sur soi5. Le savoir qui nous occupe est d’une nature particulière et opaque. Et si le langage échoue c’est précisément parce qu’il bouche le sens. Le langage que nous utilisons se situe à la place d’un sens qui n’adviendra pas là où l’attendait6 et ce que le sujet ne cesse de rencontrer dans le langage, c’est sa propre absence. Donc, s’il est un savoir, il est de l’inconscient. Comme l’a fait Michel Lapeyre, jouons sur les génitifs afin de saisir la distinction entre connaissance et savoir. De l’inconscient, le psychanalyste en sait quelque chose, ainsi que les étudiants en psychanalyse ou ses aficionados. Ce serait là le génitif objectif qui se réfèrerait à la connaissance des choses de l’inconscient. Mais si l’on bascule comme le propose Lacan du côté subjectif, et que l’on entend « savoir de l’inconscient » comme celui détenu par lui, l’on voit rapidement que l’errance du sujet dans la jouissance phallique est celle d’un poisson dans son bocal. Si l’accès au symbolique a rendu possible pour le sujet un aller au-dehors, son désir sous le bras, il y est allé pensant savoir quelque chose du monde et c’est là tout son drame et toute sa beauté.
« Entre l’homme et la femme il y a l’amour.
Entre l’homme et l’amour il y a un monde.
Entre l’homme et le monde il y a un mur7. »
Si l’on entre dans ces vers via la logique qui les compose, « le monde » recouvre le territoire occupé par « la femme ». Un monde que l’homme croit connaître. Or connaissance et savoir ne s’équivalent qu’à cause du discours scientifique et des présupposés qu’il a induits et imposés, qui ne sont pas ceux de la psychanalyse. C’est pourquoi entre l’homme et le monde il y a un mur. Celui de la castration. « Le savoir laisse intact le champ de la vérité » ajoutera Lacan. Et réciproquement. Une façon d’expérimenter qu’aucun savoir n’attrapera jamais complètement le sujet : il n’y a pas de savoir sur la vérité du rapport entre les sexes, et c’est précisément pour cette raison que nous recourons à la parole. Instauration du symbolique donc, mais tout n’y est pas entré, c’est le réel de la jouissance qui échappe, et qui s’attrapera parfois par effet de déchiffrage et l’on voit poindre à nouveau l’inextricable rapport entre vérité et savoir. On ne peut dès lors qu’expérimenter l’absence d’unicité du signifiant -il n’a de sens que singulier et donc équivoque-, et cette contingence provoque des manifestations de l’inconscient qui sont porteuses d’un savoir qu’on peut dire sans sujet, insu de lui. « Je veux dire que cet heureux rapport, ce rapport prétendu harmonique entre ce qui vit et ce qui l’entoure, est perturbé par l’insistance de ce savoir, de ce savoir sans doute hérité – ce n’est pas un hasard qu’il soit là – et cet être parlant…pour l’appeler comme ça, comme je l’appelle…cet être parlant l’habite, mais il ne l’habite pas sans toutes sortes d’inconvénients. »8
Le symptôme, dépositaire dissident du savoir inconscient
C’est ainsi que le patient qui pousse la porte du cabinet conçoit son symptôme comme quelque chose qui l’encombre, le fait souffrir. Un inconvénient. Or, ce qui distingue la psychanalyse des psychothérapies c’est bien cela, le parti-pris du symptôme paradoxalement considéré comme solution qui permet au sujet de tenir dans le lien social. La métaphore de Michel Lapeyre concernant le symptôme est à ce titre éclairante : le symptôme quant au savoir précède le sujet, comme celui qui dans une grotte obscure s’orienterait de la lumière d’une torche. Il ne s’agit donc en aucun cas de le dissoudre, ou d’en guérir le sujet. Soigner c’est mettre au pas et faire entrer dans les rangs de l’universalisme, de la science, de la norme et du capital : « si je te soigne tu (re)deviendras productif » ; faisant au passage du sujet un objet de connaissance. C’est en cela que le symptôme est dissident face à ce que le DSM nomme disorder. Depuis sa simple dénomination on voit bien qu’il fait désordre, il trouble l’ordre public et la marche capitaliste, l’éradiquer serait nous faire marcher en aveugle dans un monde qui nous consomme et c’est aussi un postulat qui oublie de faire l’hypothèse de l’inconscient et de son savoir. Mais le rapport métaphorique s’arrête là, et Colette Soler de nous rappeler que le symptôme est ce qui sait, tout en incluant un part de non-savoir. Il nous devance donc dans la vie et dans l’analyse. Ce n’est pas le symptôme ou le sujet qui sont imaginaires, mais c’est de les croire reliés. Autrement dit, le symptôme n’affecte pas le sujet mais l’être du sujet ; on se situe dans un hors-langage, dans un hors-sens. Colette Soler dit même que le symptôme est « analphabête », non pas pour le dénigrer, mais bien pour insister sur son caractère hors-langage. Il n’est donc ni imaginaire… ni symbolique, et ne peut à ce titre que mettre en échec tout savoir, en tout cas tel que le conçoit (le sujet de) la science. Le symptôme est ce que le sujet a de plus singulier, et sur lui aucun savoir universel ne peut être posé, rien n’en sera dit en dehors de l’espace analytique, de sa parole , et surtout des manifestations de son inconscient. Quel rapport à la théorie et à la connaissance laissera donc ouverte la porte de la rencontre entre le sujet-analysant et « son psy » ?
« Devenir analyste ne se fait pas sans savoir, mais en dépit du savoir »9
« Si la vérité ne peut jamais que se mi-dire, c’est là le noyau, c’est là l’essentiel du savoir de l’analyste »10, nous mettons ainsi le doigt sur le troisième paradoxe qui rend la psychanalyse si subversive, et qui nous permet de comprendre pourquoi elle n’aurait pas pu naître à un autre moment qu’à l’orée du XXème siècle, où déjà le patriarcat décline ; et pourquoi l’analyste ne peut au mieux être qu’un « océan de fausse science». Celui du psychanalyste est un savoir d’inexpert, ce qu’il sait c’est qu’il y a de l’incurable, il sait (grâce à Freud) qu’éduquer est impossible, il sait les pulsions et leur ingouvernabilité. Il sait ce qui achoppe dans le lien social, qu’on ne peut ni parfaitement s’y intégrer, ni sans mourir s’y dérober, c’est que Sidi Askofaré et Colette Soler nommeront « la politique du symptôme ». Un savoir ce qu’il y a à savoir. Le savoir de l’analyste qui fait à toute personne le crédit d’être sujet est tout aussi dissident que le symptôme, et ce paradoxe apparaît de plus en plus soluble dans une forme d’acceptation : la talking cure est à l’affût d’un savoir qui se caractérise d’être hors du dire. Pierre Bruno11 propose une distinction qui permettra d’entrer plus avant dans ce paradoxe nous menant à mieux saisir la nature du savoir dans la pratique analytique en proposant une distinction entre « le dire » et « l’être-dit ». Dans ce dernier, il est question d’un savoir duquel le dire du sujet est absent. L’être-dit est quelque chose dont on ne sait pas qui le dit, mais qui est dit quand même. C’est la raison pour laquelle, selon Lacan, l’interprétation est dévoilement d’un non-sens. De quoi détrôner le savoir scientifique et la figure du psy-qui-sait ! Il n’y a pas de savoir en soi, et la singularité d’un cas, pour rejoindre Colette Soler, n’est jamais écrite dans les livres. C’est là que se dévoile peu à peu la nature du savoir de l’analyste dont on voit qu’il n’est pas instruit mais produit, à l’aune de sa propre méconnaissance qu’il a découverte au fil de la cure. Ainsi, ce qui en fait le savoir nous apparaît être le résidu de son expérience de la cure au cours de laquelle quelque chose a lieu de l’ordre d’un saisissement de la frontière sensible entre savoir et vérité. Et la plus grande des vérités, nous dira Lacan, c’est qu’ « il n’y a pas de métalangage », il faudra renoncer à rendre compte de cette vérité ailleurs que dans notre corps et dans notre désir, enraciné dans le refoulement originaire. Lacan à ce désir de savoir ajoutera qu’il « nous faut renoncer dans la psychanalyse à ce qu’à chaque vérité réponde son savoir12 ». C’est-à-dire en passer par l’expérience répétée à l’envi que quelque chose toujours échappe, et que c’est précisément à cette échappée que s’arrimera notre désir. C’est cela qui produit de l’analyste, ce savoir qu’il en a tiré, et la jouissance qui s’y est attachée avant de choir face au réel du mur infranchissable, le langage n’étant là que pour suppléer au non-rapport sexuel. Et nous rejoignons ici Michel Lapeyre quant à ce sentiment de gratitude, « qui fait le savoir de l’analyste, c’est de là même que provient l’autorisation de l’analyste13 »..
Ce qui donc serait en jeu c’est un savoir y faire avec « ça », et forcément « ça » implique le désir. Un désir qui va jusqu’à accepter de se place en position de déchet afin que cette méconnaissance non pas ontique, mais éthique, advienne chez l’analysant. Désir de l’analyste de voir le sujet accéder et revendiquer ce qui instituerait son absolue singularité, celle qui ferait (fera?) de lui « un entre- autres ». C’est un désir à deux versants : « le savoir de l’analyste est corrélé au désir de l’analyste en tant qu’il est sa source et sa ressource14». Il ne s’agit pas d’une soif de savoir qui nous placerait dans l’optique d’une accumulation capitaliste de connaissances mais plutôt d’un désir de savoir pourquoi on aurait aussi pu n’en vouloir rien savoir. Et là se pose toute la question du maniement du transfert et par exemple des silences de l’analyste qui invitent le patient à savoir peu à peu y faire avec ce non-savoir qu’il pourrait bien finir par chérir. Ainsi si l’analyste incarne la volonté de lever le refoulement, nous comprenons qu’il ne s’intéresse pas au sujet, mais à son inconscient, c’est lui le sujet-supposé-savoir. Le sujet lui, ne fait que parler, et nous venons de voir qu’il est dans le monde face au mur. Nous, ce qui nous intéresse, ce sont l’inconscient et ses manifestations qui recèlent tout ce qu’il ne sait pas, n’arrive pas à dire et qui à l’horizon permettront la destitution du sujet de la connaissance. C’est cette nature-là du savoir que nous guettons. Et c’est elle qui a permis qu’à un moment T de la cure, du psychanalyste ait été produit. Ce n’est pas la formation qui rend compétent à l’acte, ce ne sont pas l’accumulation des connaissances qui permettent à l’analyste de s’autoriser, mais la transformation du sujet dans la cure : « la formation n’est pas là pour produire l’acte mais pour en soutenir l’éthique15 ». Ainsi, ce qui va faire le lien entre l’analyste et son analysant, c’est l’intérêt pour le symptôme, la racine-même d’un savoir inconscient, insu du sujet. C’est ainsi que nous entendons le fait que « la psychanalyse se donne comme finalité de permettre au sujet de se retrouver dans son symptôme »16.
II Place du savoir dans la pratique de la cure analytique
La place du savoir dans le discours analytique… et ailleurs
Des quatre discours dont le sujet use pour s’inscrire dans le lien social, il n’est toujours que le sujet supposé du signifiant qui reste le maître du jeu. Ce qui fait la spécificité du discours analytique, c’est de poser S2 (le savoir) en position de vérité. C’est dans le cadre de la cure que le sujet peut saisir qu’il s’était identifié à tel ou tel signifiant, et bien qu’il ne remonte pas la chaîne jusqu’à son origine pour en avoir une vision éclairée, il peut arriver que se produise un effet de vérité, c’est-à-dire que quelque chose de son inconscient lui permette de saisir où était logée l’identification à un signifiant de l’Autre, et ceci se reproduira jusqu’à ce que le sujet n’en ait plus cure, jusqu’à ce que quelque chose de lui comme sujet soit advenu et qu’il se désaxe de l’Autre et des demandes qu’il lui suppose, voire lui adresse : la question ne sera pas « répondue », on sera par contre guéri du désir d’y répondre. Être le support d’un discours, c’est être supposé pris dans un signifiant, et le sens que l’on en tire provient de la répétition et des formes qu’elle prend, jamais à l’identique ; c’est ce qui pousse Lacan à dire que l’interprétation n’est pas révélation d’un sens mais d’un hors-sens. Si S2 est en position de vérité, c’est bien que toute vérité est nécessairement singulière. Seulement, contrairement au discours capitaliste sur lequel nous allons revenir tout de suite, dans le DA comme dans les trois autres « discours toujours en action », l’accès à la vérité est barré // par la jouissance. Dans le DA comme ailleurs, ça échappe, et toute vérité ne pourra qu’éventuellement être mi-dite. Là où la supercherie est colossale, c’est que le discours capitaliste, nourri par le discours de la science, place les S1 en position de vérité ; cela signifie que les signifiants qu’il produit sont vérités. C’est ce qui a été appelé l’économie de la connaissance et qui a pu porter certains à croire qu’un Master de Psychanalyse permet de « poser sa plaque », qu’un bon psy peut éradiquer un symptôme, ou encore qu’en payant son diplôme on s’acquitte de son droit à s’installer. La science a bâti son discours derrière le mur, et avec elle le discours capitaliste puisque, s’inspirant du scientisme, il a fait sauter la barrière de la jouissance qui empêchait l’accès à la vérité. Et tous deux font croire à celui qui ne saurait pas les rejoindre derrière le mur qu’il n’est qu’un incapable que la science pourra soigner s’il s’en donne les moyens ; comme s’il suffisait de traverser la rue et de mettre une cravate pour trouver un emploi. Ainsi, le discours de la science « suture » le sujet à l’endroit-même où la psychanalyse considère qu’il advient comme divisé, et ne saurait éthiquement s’arrimer à autre chose qu’au plus singulier de chacun d’eux. L’un dépose de l’analyste au pied du mur, aux côtés du sujet, et l’autre s’est construit derrière le mur. Dans le DA, la vérité qui nous frappe, et nous rejoignons ici Colette Soler, c’est qu’on ne saura pas comment être homme ou femme face à l’Autre sexe, à cela chaque parlêtre doit faire face sans le secours d’aucun discours établi ; les choses de l’Amour étant hors discours et hors lien social, puisqu’il n’y a pas de rapport sexuel inscriptible. Nous pourrions résumer cela en disant que dans la cure, le sujet est à chaque fois plus dans le moins…
La vérité est un trou dans le savoir
Le savoir dans la pratique de la cure analytique est troué, et cela l’analyste l’a expérimenté et s’en est trouvé, comme sujet, transformé. Il a expérimenté que le savoir inconscient a des effets de vérité qui marquent l’être du sujet, il « sait » l’incidence du signifiant. Nous allons devoir recourir rapidement à la topologie pour éclairer un nouveau paradoxe selon lequel le savoir est l’envers de la vérité, et inversement. Ils sont tout à la fois unis et séparés par le mur. Et cela c’est la bande de Moebius qui permet de le visualiser, ils peuvent se rejoindre à tout moment, ils sont l’envers l’un de l’autre, mais pas contraires, leur rapport a également été figuré par la bouteille de Klein laissant entrevoir que l’un se rejetait dans l’autre et inversement.
La prosopopée dont a usé Lacan pour en rendre compte « Moi, la vérité, je parle17» est l’occasion de saisir la qualité insue de ce savoir : « inconscient savoir sans sujet ». La vérité est toute entière liée au désir, lui-même issu du refoulement originaire et qui en produit l’objet (a) comme cause, un objet métonymique qui court tout au long de ce qui se déroule, et qui fait jouir le sujet. Lacan dira « dans cette tracasserie nous sommes dans notre aire naturelle ». Et Maud Mannoni de préciser : « ce que l’hystérique donne à voir c’est un déchirement qui creuse l’écart entre savoir et vérité, une vérité qui ne se laisse pas contenir18 ». Le savoir et la vérité sont à une place insaisissable et ce n’est pas du ressort du sujet, ni de celui de l’analyste de décider qu’une vérité éclatera ou qu’un savoir sera émis, parce que « la vérité, ça s’impose ». En effet, « l’inconscient n’est pas une connaissance : c’est un savoir (…) c’est un savoir dysharmonique, qui ne prête d’aucune façon à un mariage heureux (…) Cette espèce de mise en co-vibration, en co-vibration sémiotique, en fin de compte, c’est pas étonnant qu’on appelle ça comme ça pudiquement : le transfert »19, où sont mises en place les conditions pour que le sujet s’explique son rapport au monde, où le jugement est suspendu. Ce sont les actes dits symptomatiques qui recèlent le savoir et c’est à cela qu’est suspendue la position du psychanalyste. Dans le transfert, ça raisonne pas, ça r.é.s.o.n selon les mots de Francis Ponge. Lacan nous dit dans la leçon du 06.01.72 que l’objet (a) est étranger à la question du sens, c’est pour cela que l’analyste est là pour écouter de travers ce qui se répercute sur le mur. C’est cette posture qui pourra faire qu’il y ait de l’analyste et conduire éventuellement le sujet à dévaloriser la jouissance liée au déchiffrage. En cela, Lacan dépasse la vision de Freud qui considérait que le déchiffrage du sens sexuel chiffré du symptôme comme message délivré par l’inconscient permettait la guérison du sujet. Pour Lacan, seule la traversée du fantasme et l’identification au symptôme permettent une fin éventuellement satisfaisante à l’analyse.
« Il y a du sens, mais il n’y en a pas de commun »20
L’idée que nous avons saisie et tout entière embrassée est de nous placer au pied du mur près de l’analysant, à ses côtés, tâcher en tout cas d’en faire l’expérience dans le cadre analytique, j’ai l’impression que c’est là qu’on en fait peut-être fonction. L’analyste a la lourde tache de devoir tout entendre de travers ; c’est quand il se décolle du sens premier dont le signifiant a été affublé que quelque chose de cet « heureux hasard » dont parle Lacan peut « jaillir comme un éclair ». Dans un court ouvrage collectif intitulé « Psychanalystes en devenir21», nous sommes tombée sur les mots d’un analyste au sujet de cette analysante qui parlait toujours de la même chose, de ses dépenses inconsidérées sur des sites de shopping qui la faisaient culpabiliser. Elle arrivait chaque semaine en séance et se plaignait « d’avoir encore dépensé ». S’ennuyant profondément de la répétition et des jérémiades, l’analyste en question s’est amusé à entendre de travers, et ce n’est que lorsqu’il a rétorqué à cette jeune femme « ah bon, vous avez encore des pensées, lesquelles ? », que la cure a pu prendre un virage et que la vérité a eu ses effets. C’est cela qui fait dire à Lacan que la langue ek- siste. Au lieu d’en faire une lecture psychologisante qui essaierait d’expliquer à cette cette femme pourquoi elle avait besoin de dépenser de l’argent, le psychanalyste s’est décalé et ne l’a pas dépossédée de son savoir, il a permis d’éviter « la suture du sujet » et de laisser toute entière la possibilité d’une béance. La spécificité de l’incidence du signifiant est d’agir d’abord en dehors de sa propre signification. C’est en cela que l’expérience analysante représente une mise à l’épreuve du savoir, et c’est à ce prix-là que quelque chose peut se décaler vers un savoir opaque, autre, insu. Ainsi, revenons à l’idée que l’analyste est celui qui par son désir de savoir incarne la volonté de lever le refoulement, et précisons que nous employons à dessein cette notion d’incarnation, car ce n’est pas sa personne mais bien sa position qui fait qu’il y a de l’analyste. Analyste qui doit donc, pour suivre Lapeyre, « être au clair avec les conséquences de son action et de son acte »22, acte qui ne se réalise que dans l’après-coup. Et cet heureux hasard se produit dans le cadre du transfert, où l’analyste en position d’objet (a) rend possible que se rejoue la névrose du sujet, car si ce qu’on adresse au mur a pour propriété de se ré-percuter23, c’est jusqu’à ce que, tel un éclair, le réel nous percute dans toute sa dimension qui est celle d’un impossible d’aller au-delà du mur qui laisse béant et inextricable, le lien entre vérité et désir.
III Fonction du savoir dans la pratique de la cure analytique
La fonction supposée au savoir
Nous avons choisi de nommer ainsi ce pan de la réflexion parce c’est cela qui mène le patient en cure, il suppose à l’analyste un savoir et suppose à ce savoir d’être en mesure de l’aider à se débarrasser de son mal-être pour enfin aller bien, être heureux, léger. Le savoir est intrinsèquement lié à la jouissance, nous l’avons vu, et Colette Soler d’ajouter qu’il a une fonction de régulation du fantasme, du symptôme et de la répétition, il s’inscrit dans le circuit de la pulsion ; mais tout cela est insu du sujet et se manifeste malgré lui. La place adoptée par l’analyste permet d’intégrer (a) comme cause du désir, c’est cela que le sujet réalise au fil de la cure : ce n’est pas ce savoir-là qui est aux commandes, et ce savoir-là qu’il lui suppose l’analyste ne l’a même pas. Dans la transformation opérée au cours de la cure, le sujet comme sujet de la connaissance est destitué et advient comme divisé quant au sexe et quant au savoir. Autrement dit, ce pis-aller -qu’il avait érigé et qui lui permettait de croire que s’il n’y comprenait rien aux choses de l’amour c’était par manque de savoir-, sera détruit. C’est son manque-à-être qui l’en empêche et c’est incontournable, c’est cela qui fera de lui cet entre-autres et rendra possible qu’il fasse le choix de ne plus céder sur son désir et de percevoir qu’il n’est pas identifiable à la chaîne qu’il avait créée (ou qui l’avait créé?), c’est ainsi que nous comprenons la destitution. Pas-de-pénis, pas-de- savoir. Mais pour que cela advienne encore faut-il y aller, et en revenir, autrement dit dévaloriser la jouissance du déchiffrage pour accéder autrement à un savoir y faire avec le non-savoir : le secret de l’inconscient, l’énigme de la répétition et du transfert, le mystère de la pulsion ; « faire de l’extime une fenêtre sur le réel et non plus un bouchon sur la réalité24».
« Il n’y a pas d’Autre de l’Autre », destitution et castration
Ce bouchon sur la réalité, nous l’attribuons à la place du fantasme, et voici comment nous comprenons le cheminement dans la cure : nous avons vu que toute la jouissance ne passe pas au symbolique, qu’il y a un reste, un vide central, nodal, qui prend le forme de l’objet (a) et qui se retrouve au cœur de la formation du symptôme. Ce reste que le sujet va situer dans l’Autre, Lacan le nomme plus-de-jouir et en fait la carotte qui soutient le désir institué dans le fantasme (d’où le désêtre venant en place de la prise du désir une fois la traversée effectuée). Seulement, cette carotte est un leurre qui vient nourrir le sujet au lieu-même de sa défaillance et renforce finalement son aliénation à l’Autre et à sa demande. Passer du bouchon sur la réalité à la fenêtre sur le réel comme le propose Michel Lapeyre dans son essai, Lacan en parle ainsi : « dans ce virage où le sujet voit chavirer l’assurance qu’il prenait de ce fantasme où se constitue pour chacun sa fenêtre sur le réel, ce qui s’aperçoit, c’est que la prise du désir n’est rien que celle d’un désêtre 25 ». La fenêtre sur le réel nous a été ouverte par l’insu, et par le symptôme. Tant qu’elle ne l’est pas, le sujet méconnait le lieu d’où il désire et cela se rejoue dans le transfert et dans l’inertie de la répétition. « L’idée (étant) que l’analysant cesse de croire que l’Autre veut jouir de sa castration »26, du manque se retrouve alors à tous les niveaux et le sujet peut accéder à l’ininterprétable, à l’irréductibilité de l’inconscient, à la béance du parlêtre à laquelle le symptôme fait suppléance. Comment donc ne pas l’aimer ? Lui savoir gré ? Se sentir reconnaissant de cette manifestation répétée d’un impossible à savoir quant à la genèse de ce qui fonde le désir du sujet? Accepter la destitution du sujet, accepter qu’il y a du non-savoir fera l’objet d’un franchissement puis d’un deuil, et permettra éventuellement une fin satisfaisante à l’analyse27. Il ne sera pas possible au sujet d’accéder aux conséquences qu’aura eues sur lui le désir de l’Autre, c’est à la fois une perte et un soulagement, c’est accepter que de la genèse profonde de son désir il n’en saura rien, il n’y aura pas accès car quelque chose pour toujours et depuis toujours, a chu. « Le désir de l’homme est le désir de l’Autre » et c’est là, dans ce verbe « être » que loge l’insu dont la place est occupée par le symptôme. Mais cela n’empêche pas par le déchiffrage et le travail de cure de tâcher de se dépêtrer en partie des identifications aliénantes qui nous ont forgés. Le savoir nous informe sur le réel du mur, et c’est ce savoir qui émerge de l’analyse qui permet de se faire une idée de ce qu’est l’objet (a).
L’amour de la vérité, la castration, l’identification au symptôme
C’est dans ce sens que nous avons compris pourquoi Michel Lapeyre parlait de gratitude. Si le savoir est logé dans le réel -ce dont l’écriture borroméenne peut rendre compte-, si le symptôme en sait un bout sur moi, je n’ai plus qu’à me laisser enseigner par lui. L’expérience analytique est ce qui, quant au symptôme fait passer le sujet de l’avoir à l’être -ce qui suppose d’avoir dévalorisé la jouissance qui lui était accolée28. Si le manque-à-être est la vérité qui s’impose dans la cure comme savoir, on est immédiatement guidés vers une zone de non-savoir, vers une non-prise et il nous apparaît que c’est cela qui soutient entièrement l’éthique de la psychanalyse : un rapport différent à la jouissance que celui que proposent (imposent?) la religion ou la science, une éthique fondée sur le manque comme cause du désir. C’est ainsi également que nous comprenons le sinthome, comme savoir qui mène là où il n’y a pas de savoir. Il ne reste alors que la vérité qui parle et qui agit, rendant possible « l’accès à une non-duperie sur les contingences essentielles (le père, la mort, la femme) et les accidents qu’elles provoquent et qui sont ce qui peut nous arriver de mieux en nous rendant tant responsables de nos rêves que de nos symptômes et de nos actes (manqués ou non), et qui nous rend comptables d’un destin que l’on se fait malgré ou à cause des conditions et des déterminants, avec et contre les signifiants qui nous déterminent, grâce aux rencontres où se font nos choix, où se prennent nos décisions et nos paris »29. L’incidence signifiante et ses conséquences « sont ce qui nous arrive de mieux » car elles font de nous des êtres responsables des manifestations et productions qui sont les nôtres, rendant tangibles la singularité de chacun des sujets ; il ne nous était pas possible de ne pas citer in extenso cet enseignement de Michel Lapeyre…. Le symptôme est ce qui permet au sujet d’entrevoir ce qu’il est de réel. C’est « un savoir emmerdant » comme dirait Lacan, mais qu’on doit pétrir, élaborer, de manière à ce qu’on en soit moins dupes et qu’à travers lui finisse par poindre le fantasme qui nous habite et nous mène par le bout du nez. C’est cela l’expérience de la cure, que l’on mène accompagné d’un analyste posté près de nous, au pied du mur. On voit bien là la différence entre le savoir et la connaissance, en ceci qu’il nous mène au réel qui l’abrite. Le sinthome sait l’au-delà de ce qu’il y a à savoir, il sait ce qui reste.
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Dans « La méprise du sujet supposé-savoir», Lacan file une métaphore dont la portée peut être topologique. Pour retrouver l’inconscient dit-il, pas d’autre choix que « d’y mettre toute la gomme puisque c’est sa fonction d’effacer le sujet ». C’est ce qui l’amènera à dire que l’inconscient c’est de ne pas se rappeler de ce que l’on sait, c’est d’ailleurs ce qui se produit en fin de cure, l’impression de l’avoir toujours su. Mais ce savoir ne se livre qu’à la méprise du sujet, la destitution est un horizon désirable, et « mettre la gomme » couvre un double-sens si dense qu’on y entrevoit le joint entre vérité et savoir que nous avons tenté d’éclairer tout au long de cette réflexion qui nous aura finalement menée à nous interroger sur la vérité. En effet, contrairement à notre rapport au savoir qui est historiquement marqué et durablement chamboulé par la science, le réel lui est anhistorique. C’est ainsi que nous comprenons l’invitation que fait Lacan aux analystes de « rejoindre la subjectivité de leur époque », ce n’est pas pour s’y complaire, mais pour pouvoir accompagner et analyser ceux qui s’y inscrivent au risque, sinon, de se retrouver de l’autre côté du mur, auprès de ceux qui savent… et de côté-ci on a vite fait de sombrer dans la croyance que les « nouveaux sujets contemporains » pourraient ne plus rien vouloir savoir de leur inconscient et seraient ainsi devenus inanalysables. Et ce savoir inconscient, insu, n’empêche pas la rencontre de « l’autre savoir », celui qui a été déposé par l’expérience. D’ailleurs le discours universitaire vient au secours du discours de l’analyste, Lacan en aura été le grand acteur. Mais pour être enseigné par l’expérience, pour être instruit par l’analyse, il faut la traverser, en tirer des conclusions et les formuler30. Il nous apparaît à l’issue de cette réflexion que si la psychanalyse dispose d’un savoir, c’est « d’un savoir sur la vérité »31, et qui déplace considérablement le rapport instauré par la science. Un savoir sur la vérité qui s’impose et marque son être du sceau du manque. Cette réflexion aura représenté pour moi une véritable bataille. Les livres et les notes se sont empilés, et il m’a fallu lutter pour ne pas me contenter d’étaler des connaissances, y suis-nous même parvenue ? Pour clore cet écrit, nous nous permettrons de relater un rêve datant d’il y a quelques jours alors que nous étions justement en train de livrer bataille. Je me retrouvais dans la cité, mon symptôme littéralement dans les bras, et à aucun moment il ne s’est agi de le déposer ou de m’en défaire, je devais faire avec ce symptôme et me déplacer quand même, mener à bien mes activités quotidiennes avec mon symptôme entre les bras. Quand mon analyste me demandera de le décrire, je répondrai qu’il est assez semblable à un organe, de couleur gris-noir et plutôt visqueux, et qu’il mesure « un petit mètre » ». Et là, les bras m’en sont tombés si j’ose dire et sans que je ne puisse les contrôler, des larmes ont commencé à couler abondamment face à cet éclair vérité, face à ce « petit maître » qui en sait tant sur la cause de mon désir. Toutes les dernières séances tournaient autour de mes connaissances, de mes diplômes, de mon « savoir », de mon désir d’analyste, et butaient sur ma frustration de n’avoir pas de mentor, de n’avoir personne alentour qui puisse ni me répondre, ni répondre de moi. Et voilà que ce rêve et les mots que j’ai eus pour en parler me mirent sur la voie/voix de ce « petit maître » qui certes ne me complètera pas plus qu’il ne me répondra, mais qui est la preuve que l’expérience de la cure est celle de la vérité qui troue le savoir. « L’amour de la vérité, c’est l’amour de la faiblesse dont nous avons soulevé le voile, c’est l’amour de ceci que la vérité se cache, et qui s’appelle la castration32 »
1 MANNONI Maud, Le symptôme et le savoir, Soutenance, Paris, Seuil, 1983, page 16
2 LAPEYRE Michel, Le savoir du psychanalyste, pas tant, pas tout, Paris, La petite librairie, 2019, page 103
3 LACAN Jacques, « L’acte psychanalytique, compte-rendu du séminaire », Autres écrits, 1969-2001,Paris, Seuil,
page 375
4 LACAN Jacques, Le séminaire, XXI, « Les non-dupes errent », Leçon du 11.06.1974, en ligne sur http://staferla.free.fr/S21/S21%20NON-DUPES….pdf
5 LAPEYRE Michel, ib., page 106
6 Réflexion inspirée par la lecture du séminaire « Les non-dupes errent », de Lacan.
7 LACAN Jacques, Le séminaire, XIX-b, « Le savoir du psychanalyste », Leçons du 06.01.1972 et du 03.02.1972, en ligne sur http://staferla.free.fr/S19b/S19b%20Le%20savoir%20du%20psychanalyste.pdf / / Ici, la leçon du 06 janvier 72 où Lacan reprend un poème de Tudal permet d’y voir plus clair sur le mur du réel.
8 LACAN Jacques, Le séminaire, XXI, « Les non-dupes errent », Leçon du 11.06.1974, en ligne sur
http://staferla.free.fr/S21/S21%20NON-DUPES….pdf
9 LAPEYRE Michel, ib.
10 LACAN Jacques, « Le savoir du psychanalyste », Leçons du 06 .01.1972, ib.
11 BRUNO Pierre, Une psychanalyse : du rébus au rebut, Toulouse, Erès, 2000, pp 93 à 113
12 LACAN Jacques, «La science et la vérité », Ecrits II, Paris, Seuil, 1966-1999, page 349
13 LAPEYRE Michel, ib., page 152
14 LAPEYRE Michel, ib., page 137
15 SOLER Colette, Lacan, L’inconscient réinventé, Paris, PUF, 2009-2019, page 88
16 BRUNO Pierre, ib., page 112
17 LACAN Jacques, « La chose freudienne ou Sens du retour à Freud en psychanalyse » 1955-1999, Écrits I, Paris, Seuil, page 406
18 MANONNI Maud, ib., page 22
19 LACAN Jacques, « La méprise du sujet supposé-savoir », Autres écrits, 1967-2001,Paris, Seuil, page 336
20 LACAN Jacques, « Le savoir du psychanalyste », Leçons du 06 .01.1972, ib.
21 MARTINEZ Ignacio Garate, Psychanalystes en devenir : les constructions d’une clinique, Encre marine, 2010
22 LAPEYRE Michel, ib., page 114
23 LACAN Jacques, « Le savoir du psychanalyste », Leçons du 03.02.1972, ib.
24 LAPEYRE Michel, ib., page 106
25 LACAN Jacques, « Proposition d’octobre 1967 sur le psychanalyste de l’École », Scilicet, n° 1, Paris, Le Seuil, 1968, p. 22.
26 SAKELLARIOU Dimitris, « Traversée du fantasme versus identification au symptôme », Psychanalyse, 2003/13, numéro 28, pages 21 à 24, en ligne sur https://www.cairn.info/revue-psychanalyse-2013-3-page-21.htm&wt.src=pdf
27 BRUNO Pierre, ib., page 113
28 BRUNO Pierre, « L’identification au symptôme », dans La passe, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 2003
29 LAPEYRE, ib., page 149
30 L’idée est de Colette Soler
31 L’expression est de Claude Landmann
32LACAN Jacques, Séminaire XVII. L’envers de la psychanalyse, 1969-1970, Paris, Seuil, 1991, page 58
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